Créez vos perruques extravagantes

Extrait du livre "Petites histoires des gens de France" de Jean-Pierre Rorive.

Dans les années 1770-1780, la chevelure connut le comble de l'extravagance : elle fut extraordinairement papillotée, crêpée, frisée, enflée de crin, enduite de pommades, colorée et décolorée ou encore aromatisée. Les coiffures étaient des monuments qui pouvaient atteindre près d'1 mètre de circonférence. Des forêts ou des jardins entrelacés de ruisseaux argentins poussèrent les chapeaux. Muller était réputé à Paris pour avoir mis à la mode en 1775, les perruques féminines "pouf". Garnies de plumes d'autruche et autres oiseaux, d'aigrettes, de fleurs, de gaze, de dentelle, de diamants, ces véritables pièces montées atteignaient jusqu'à 6 étages. A en croire les satires de l'époque, elles obligeaient les dames à se déplacer en carrosse tête baissée ou à genoux, à moins de passer la tête entière par la vitre. On parla même de la nécessité de surélever les portes dans les châteaux.
Un humoriste prétendit : "Les panaches géants ont rendu bossues toutes nos élégantes."
Un autre renchérit : "La femme aussi de haut plumage se pare au pays des Incas, mais là les beautés sont sauvages et les nôtres ne le sont pas".
Le chef d'oeuvre de la démesure fut sans doute la commande par une grande aristocrate de la réplique d'une illustre frégate, avec gréement et canons pour la fixer aux ondulations de sa chevelure.
Marie Antoinette était particulièrement friande de ces perruques. Léonard son coiffeur, était un véritable architecte-entrepreneur rococo à l'imagination débordante. Il modelait avec le peigne des paysages et des panoramas avec parterres, fruits, maisons, navires ou des illustrations de l'actualité. Ainsi après le succès d'un opéra de Gluck, son chef-d'oeuvre fut "la coiffure d'Iphigénie avec des rubans de crêpe noir et la demi-lune de diane.
On imagine que les "emperruquées" devaient avancer comme des équilibristes pour ne pas faire tomber l'espèce de grande amphore que l'on avait déposée sur leur tête! Le tout était plus ou moins maintenu par une masse d'épingles, si volumineuse qu'en 1780 la "Correspondance littéraire" craint qu'en cas d'orage toute cette ferraille n'attirât la foudre!
Pour comble c'est pendant les famines du temps que l'on saupoudra le plus les perruques de farine, au point que les coquets des deux sexes de la noblesse et de la bourgeoisie devaient se protéger d'un peignoir et se couvrir le visage d'un cornet.
Sébastien Lemercier estima en 1782, qu'au moins "dix mille infortunés" auraient pu être nourris tous les jours avec cette opération de meunerie. Mais la vermine les vengeait bien par les infernales démangeaisons qu'elle infligeait aux obsédés de la capilliculture.
Selon une source contemporaine, on blanchissait aussi les perruques avec de la poudre d'amidon, souvent mêlée de "racine d'iris", de "bois vermoulus ou pourri", d'"os desséchés ou brûlés jusqu'à blancheur et qu'on passe a travers un tamis de crin, après qu'on les a bien pilés".
Amusez-vous à créer vous aussi des perruques actravagantes comme au XVIIIème siècle.

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